Le fait de simuler des données de séquençage est une approche de plus en plus populaire pour qui aime à jouer avec les solutions analytiques de séquençage haut-débit. Il va sans trop de développement nécessaire que l’une des caractéristiques de ces jeux de données synthétiques est leur totale maîtrise (organisme(s) à l’origine de la séquence, taux d’erreurs, d’insertion, de délétion, % de séquences contaminantes etc...). Le tout permettant relativement aisément d’exploiter des métriques telles que la F-measure qui peut se définir comme, un métrique qui combine la moyenne harmonique du rappel (sensibilité) et de la précision (spécificité), ceci donnant
A des fins de comparaisons de différentes méthodes: plus une F-measure est élevée et proche de 1, plus votre méthode de mapping de reads, par exemple, sera jugée performante (encore faut il que le temps d’exécution soit jugé acceptable). Plus trivialement, ces reads synthétiques permettent de prendre en main les ressources, les logiciels et autres contingences nécessaires à une analyse post-séquençage liée à une technologie que vous souhaiteriez maîtriser. Des technologies pour lesquelles, trouver des données contrôlées, conformes à vos attentes, est plutôt difficile à exhumer. Certes la banque SRA du NCBI héberge une grande quantité de données produites sur un large spectre de technologies mais principalement dans un contexte de recherche donc difficilement contrôlable. Seules les séquences relatives à des run test, à partir de l’ADN d’organismes pris comme calibrateurs, telle que la coli DH10B permettent d’appréhender ces données en réalisant l’hypothèse que l’organisme séquencé correspond parfaitement à la séquence de référence disponible (est ce systématiquement le cas ? nous pouvons largement en douter…).
Quoi qu’il en soit un nombre croissant d’outils est disponible. Ces outils plus ou moins paramétrables permettent de simuler des données d’à peu près n’importe quel séquenceur… La publication de Merly Escalona et al. dans le Nature Reviews (Genetics) de juin 2016 vous est disponible en cliquant sur l’image « A comparison of tools for the simulation of genomic next-generation sequencing data » en tête de cette article. Cette publication est, à ce jour, le plus complet tour d’horizon de cette problématique liée aux simulateurs de données de séquençage… problématique qui n’est pas le seul apanage des bio-informaticiens ou bio-analystes…
Ce schéma reprend les caractéristiques de la vingtaine de simulateurs abordés dans la publication Escalona et al.
A moins de sortir d’une longue phase d’hibernation, tout un chacun aura eu les oreilles rebattues par les applications liées à la technologie CRIPSR/Cas9, la révolution de l’édition de gènes (comprenez modification). Plus facile à mettre en oeuvre que les technologies TALEN et autres nucléases doigt de zinc (voir la table ci-dessous), cette technologie est tout à la fois moins onéreuse et nettement plus efficace. Cette technologie est souvent comparée, du fait de sa précision d’utilisation, à une méthode de micro-chirurgie. Un nombre exponentiel d’articles scientifiques et non scientifiques font le panégyrique de cette révolution qui est la conséquences des travaux de Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier. Ces dernières ont permis de configurer cette technologie à partir de l’élucidation d’un mécanisme de vaccination primitif bactérien (nous reviendrons sur ce point fondamental dans un futur article).
Technologie | Première utilisation | Première application sur animaux vivants | Echelle de temps pour la mise en œuvre |
Zinc finger nucleases | 1996 | 2002 | mois / année |
TALENs | 2010-2011 | 2011 | semaines |
CRISPR/Cas9 | 2012 | 2012-2013 | jours |
Donc non ! il ne s’agit pas ici uniquement de contribuer à l’enthousiasme, certes communicatif, de cette révolution dans le domaine des biotechnologies qui est lui-même friand de ces révolutions qui se succèdent les unes aux autres… Il s’agit dans ce premier article abordant CRISPR/Cas9 de proposer un début de décryptage de ce qui se cache derrière la terminologie de Gene Drive, application de CRISPR/Cas9. Cette terminologie est encore une fois peu aisée à traduire à mi-chemin entre le pilotage et le forçage génétique. Quoi qu’il en soit derrière l’appellation Gene Drive, se cache une technologie qui mérite que l’on s’arrête pour pousser plus avant la réflexion, tant l’enfer est pavé de bonnes intentions… Pour faire monter la pression, il faut savoir que James Clapper, le directeur du renseignement national des États-Unis, a placé la technologie CRISPR mais surtout sa formulation « Gene Drive » au niveau des armes de destruction massive… rien que ça.
Gene Drive, technologiquement concentre dans une cassette, l’outil permettant d’accélérer sa propagation (les ciseaux permettant la microchirurgie sont embarqués et encodés au sein même du génome ciblé) ainsi que le gène que l’on souhaite voir introduire au niveau d’une espèce donnée, évidemment cette technologie s’intéresse principalement aux populations sauvages. Ainsi cette cassette possède sa propre capacité de propagation, échappant aux lois de Mendel. Correctement encodée au sein d’une partie de population « augmentée ou diminuée », une dizaine de générations d’individus se reproduisant de façon sexuée permet de faire en sorte que la cassette a contaminé l’intégralité ou l’extrême majorité de la population sauvage (voir le schéma ci-dessous). L’exemple souvent développé, sponsorisé par la Fondation Bill-et-Melinda-Gates, consiste à proposer aux dirigeants africains des anophèles modifiés par cette technologie pour être résistants au parasite, Plasmodium falciparum, l’agent du paludisme. Rappelons que 650 000 personnes meurent chaque année de la malaria (rapport OMS de 2013), principalement sur le continent africain. Toujours dans les bons coups, Bill, pour soigner son karma! Ce dernier oublie néanmoins que le moustique génétiquement modifié agent mutagène puisque porteur de la cassette Gene Drive ne s’arrête pas aux frontières… mais qu’importe le moyen technologique existe donc que ne serions nous pas de fâcheux obscurantistes à réfléchir aux conséquences de l’utilisation de cette technologie avant de l’employer la fleur au fusil. Les « obscures rabat-joie » souvent du côté des écologues s’opposent aux biologistes moléculaires, rapides prescripteurs d’une technologie prometteuse pour éradiquer un nombre substantiel de fléaux, quitte à modifier durablement la nature pour l’intérêt supérieur humain ou parfois même pour l’intérêt supérieur de quelques uns…
La technologie Gene Drive peut être utilisée pour :
• Éradiquer les maladies telles que le paludisme, la dengue, la fièvre jaune, virus du Nil occidental, la maladie du sommeil ainsi que beaucoup d’autres en modifiant les espèces d’insectes vecteurs des parasites, virus, bactéries causes de ces maladies
• Éradiquer les espèces envahissantes. Les dix premières espèces envahissantes aux États-Unis causent environ 42 milliards USD de dommages chaque année
• Certains évoquent avec beaucoup d’aplomb, l’utilisation de cette technologie pour une agriculture plus « durable » en inversant la résistance aux pesticides et aux herbicides. Cette fois c’est la plante résistante au glyphosate (la molécule du RoundUp) qui est ciblée.
Que de beaux et bons sentiments… en guise de promesses de cette technologie !
Les limites de la technologie :
• De « nombreuses » générations sont nécessaires pour répandre la mutation dans la population. La durée totale dépend du cycle de reproduction de l’organisme, du nombre d’individus porteurs de la cassette Gene Drive introduit initialement dans la population, de l’efficacité de la cassette et du flux génétique (transfert d’allèles d’une population à une autre). Par exemple, cela pourrait prendre quelques années pour modifier une population d’insectes. Si 10 individus d’une population étaient porteurs d’une cassette Gene Drive parmi une population constante de 100.000 organismes, il faudrait environ 16 générations – environ un an- pour se propager à 99% de la population sous de peu réalistes, conditions optimales.
• Cette technologie est inopérante sur des organismes ne reproduisant pas de façon sexuée comme les bactéries et les virus et aura des problèmes avec les espèces qui peuvent se reproduire de façon sexuée ou non, comme cela peut être le cas pour beaucoup de plantes.
• Certains types d’altérations devraient être réintroduites sans cesse. Par exemple, une cassette Gene Drive engendrant un trait qui est quelque peu nuisible à l’organisme finira par se « briser ». De même, une cassette engendrant une résistance aux herbicides inversée dans une mauvaise herbe aurait à lutter contre la sélection naturelle dans les zones où les herbicides ont été appliqués.
La technologie ouvre donc la boîte de Pandore de la modification génétique de population sauvage. Plus l’intervalle générationnel de la population cible sera court, plus l’objectif d’une population « panmutée » sera facile à atteindre. Ci-dessous vous pourrez avoir un excellent point concernant la technologie à l’aide du travail de « the National Academies of Sciences Engineering and Medicine ».
90 % de notre nourriture repose sur 23 espèces seulement. La diversité de ce que l’on cultive ou élève impacte le contenu de nos assiettes. Inversement, nos pratiques alimentaires et culturales impactent la biodiversité. Du champ à l’assiette, de l’assiette au champ, la biodiversité s’est imposée comme indicateur de la santé de notre terre nourricière, thermomètre d’un système défaillant, se corrigeant ou ignorant parfois son potentiel d’autodestruction. Après la prise de conscience, quelles solutions ?
Source : Biodiversité : prendre soin de son assiette pour prendre soin de la planète
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