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La toute puissante FDA (Food and Drug Administration) a calmé les ardeurs la société 23andMe en remettant en question la diffusion par la société californienne de tests génomiques personnels. (Étonnamment ?), la FDA ne semble pas réellement heurtée par le principe même d’une société de droit privé glanant des informations génomiques pour réaliser un commerce des plus lucratifs, motus concernant le devenir de ce type de données. En réalité, l’administration américaine, soucieuse du service rendu au consommateur, émet des doutes quant à la pertinence, quant à l’exploitation des résultats, après génotypages, des individus consentants, ainsi que sur la façon dont le tout est présenté au consommateur. Ainsi, 23andMe est mise en cause au niveau de la qualité de son service. Voici son seul « crime » aux yeux de la FDA!

L’administration américaine lui reproche :

– malgré les sollicitations récurrentes de la part de la FDA, 23andMe n’a pas fait valider par l’administration ses dispositifs diagnostiques in vitro. Elle n’a cessé d’allonger la liste (stratégie commerciale du restaurant chinois) des maladies et caractères que leur système était susceptible de diagnostiquer -avant « sa mise en demeure », 23andMe proposait un menu comportant le « diagnostic » de  254 prédispositions à des « maladies » ou aptitudes diverses.

– au sujet des maladies multi-factorielles, telles que le cancer de l’ovaire ou du sein, les résultats rendus aux clients sont très probablement constitués d’un grand nombre de faux positifs et de faux négatifs.

la FDA souhaite que l’intégralité des assertions de 23andMe soit validée pour que la société continue de vendre son kit phare : health-related genetic tests.

La société qui comptait régner en maître sur le marché de la génomique récréative, a peut-être fini de jouer les apprentis sorciers (franchement peu probable !). En effet, si l’intérêt de certains de ces tests génomiques, en soi, n’est pas à remettre en question, leur encadrement législatif est à souhaiter. En outre, avant de valider des kits « diagnostiques », il serait appréciable de lever le quiproquo : les kits proposés par 23andMe sont ils des dispositifs de génomique récréative ou des dispositifs médicaux ? La libéralisation incontrôlée de ce type de marchés pourrait avoir des conséquences dramatiques… Si des prédispositions peuvent être inscrites dans notre code génétique, il n’en demeure pas moins qu’une large majorité de maladies peut être qualifiée de multifactorielle.

Se sentir à l’abri d’une maladie parce que 23andMe vous rend un résultat dans ce sens ou dans le cas contraire, sentir l’ombre de l’épée de Damoclès, peut avoir, pour le consommateur de ces tests, des conséquences graves.

La lettre d’avertissement du 22 novembre 2013, de la FDA adressée à Anne Wojciki, montre l’étendue de l’ambiguïté : LETTRE d’AVERTISSEMENT ainsi que la réponse de 23andMe.

Anne Wojcicki a déclaré que « 23andMe travaille activement avec la FDA pour s’assurer que la firme fournit des informations de haute qualité afin que les consommateurs puissent avoir confiance ».

Ci-dessous, voici la nouvelle page qui vous accueille sur le site de 23andMe qui peut continuer à vendre ses tests phylogénétiques.

Comme le disait Stephen Hawking :

« J’ai remarqué que même les gens qui affirment que tout est prédestiné et que nous ne pouvons rien y changer regardent avant de traverser la rue. »  (Trous noirs et bébés univers, Éditions Odile Jacob, 1994)

Et voici le programme en anglais:

9H00  Registration / coffee

9H15  Introduction of the day

9H30   KEYNOTE LECTURE 1: Joris Veltman (N): EXOME SEQUENCING IDENTIFIES DISEASE CAUSING DE NOVO MUTATIONS, Department of Human Genetics – Radboud University Nijmegen Medical Centre – Nijmegen, The Netherlands

10H15   Jean Muller (F): MULTI-GENE RESEQUENCING FOR MOLECULAR DIAGNOSIS OF OBESITY, Integrative Genomics and Bioinformatic Laboratory (IGBMC) – Genetic Diagnostic Laboratory – Strasbourg, France

10H45   Coffee break

11H15   Amélie Bonnefond (F): NEW TECHNOLOGIES IN GENE RESEQUENCING AND IN METHYLOME ANALYSISDepartment of Genomics and Metabolic Diseases – CNRS UMR8199 & Institut de Biologie de Lille – Institut Pasteur – Lille, France

11H45   Didier Goidin (F): LAST DEVELOPMENT OF AGILENT NGS SOLUTIONS, Agilent R & D – Les Ulis, France

12H15  Sean Humphray (UK): SEQUENCING FOR GENOMIC MEDICINE, Illumina R & D – Chesterford, United Kingdom

12H45  Lunch

14H00  Ludovic Dupont (F): FRENCH FOUNDATION FOR RARE DISEASES: STRUCTURE, MISSIONS, ACHIEVEMENTS AFTER ONE YEAR OF EXISTENCE French Foundation for rare diseases – Paris, France

14H15  KEYNOTE LECTURE 2: Nicolas Lévy (F): THE GENOMICS AND POST GENOMICS OF RARE DISEASES: THE PROGERIA CASE, Department of Medical and Development Genetics Inserm U910   Faculté de médecine de la Timone & Department of Medical Genetics – Hôpital d’enfants de la La Timone – Marseille, France

15H00  Wim Van Criekinge (B): NEXT GENERATION EPIGENETIC PROFILING, Center in Pharmaco(epi)genomics NXTGNT (www.nxtgnt.com)   Department of Mathematical Modelling, statistics and Bioinformatics – Ghent University – Gent, Belgium

15H30  Alexandra Lespagnol (F): TARGETED HIGH-THROUGHPUT SEQUENCING FOR SOMATIC ANALYSIS  ON FORMALIN-FIXED, PARAFFIN-     EMBEDDED (FFPE) TUMOR SAMPLES, Plateforme  Hospitalière de Génétique Moléculaire des Cancers, CHU Pontchaillou – Rennes, France

16H00  Coffee break

16H30  KEYNOTE LECTURE 3: Jacques Beckmann (S): COPY NUMBER VARIANTS AND THEIR ROLE IN DISEASES

17H15  Conclusive remarks

Les médias se font l’écho des conséquences dues à la révolution technologique engendrée par l’évolution du séquençage haut-débit.

Qu’est ce que la biotechnologie peut faire pour vous ? Comment peut-elle repousser la date de péremption de vos artères ?

En effet, Arte (pour TF1, il va falloir attendre un épisode de Dr House traitant le sujet) diffuse un documentaire américain de moins d’une heure dont l’objectif est de présenter les évolutions technologiques dans le champ de la médecine personnalisée.  Il s’agit tout d’abord de développer le concept pour le grand public (en s’appuyant sur des exemples où le mélodrame l’emporte un peu sur le débat bioéthique).

Ce document présente les acteurs majeurs de cette révolution biotechnologique qui sont tous américains (alors que, rappelons le, la plus grande plateforme de séquençage au monde est chinoise). Malgré quelques défauts, il s’agit d’un documentaire faisant tout d’abord oeuvre de pédagogie et développant des exemples plutôt précis comme autant d’arguments poussant à la large utilisation du séquençage haut-débit. Le documentaire vaut surtout pour l’accent mis sur la manière d’interpréter les résultats, sur la pertinence de ceux-ci mais tait les notions économiques liées à un futur marché qui s’annonce éléphantesque.

N’est ce pas un problème que votre génome soit, dans un avenir proche, séquencé, « interprété » et stocké par une firme privée ?

Le documentaire dont il est question est disponible ici-même (vous trouverez le synopsis dans les quelques lignes ci-dessous)

« LE DÉCRYPTAGE DU GÉNOME HUMAIN

D’ici peu, en échange de quelques centaines d’euros, chacun d’entre nous pourra obtenir un séquençage complet de son ADN. Des informations qu’il sera possible de lire, de stocker et de soumettre à l’analyse. Cette révolution est déjà en marche, ainsi que le montrent deux exemples spectaculaires : un patient cancéreux qui semble défier la mort et un malade de la mucoviscidose à présent capable de respirer normalement. Dans ces deux cas, les scientifiques sont parvenus à détecter et à neutraliser les anomalies génétiques à l’origine des maladies. Demain, grâce au décryptage du génome, il sera possible de faire un diagnostic personnalisé pour chaque individu et de mettre en place des traitements ultra personnalisés. Mais quelles sont les conséquences d’une telle révolution ? Connaître les maladies dont nous aurons à souffrir dans l’avenir, est-ce une bénédiction ou un fardeau ? Que se passerait-il si de telles informations tombaient entre les mains de compagnies d’assurance, d’employeurs ou de futurs conjoints ? Une chose est sûre : cette nouvelle ère, marquée par une médecine personnalisée s’appuyant sur nos gènes, est une réalité qui nous concerne tous. »

(Etats-Unis, 2012, 53mn)

ARTE F
Date de première diffusion : Jeu., 25 avr. 2013, 22h50
Date(s) de rediffusion : Dimanche, 5 mai 2013, 10h50

 

Pendant ce temps, de l’autre côté de l’Atlantique, Laurent Alexandre intervient dans l’émission grand public  : ce soir (ou jamais !). Le débat avait pour thème l’obsolescence programmée. Ainsi au bout de 1h20 d’émission Frédéric Taddeï lance le débat sur l’obsolescence du corps humain. Après un extrait de l’assez mauvais film Repo Men de Miguel Sapochnik (réalisateur de certains épisodes de Dr House… c’est dire s’il doit s’y connaître en médecine personnalisée…), Laurent Alexandre, l’auteur du livre « la mort de la mort » et président de la société DNAVisionintervient ensuite. Son discours est clair et d’une grande pédagogie, il est peut être un peu dommage que l’exemple mis en avant fut le diagnostic prénatal non invasif de la trisomie 21 par séquençage haut-débit.

Evidemment très rapidement l’argument eugéniste se fait entendre. Finalement, l’intervention de Laurent Alexandre fait écho au documentaire américain.

Si les questionnements liés à la bioéthique sont au cœur du débat, rarement sont abordées les questions économiques et de confidentialité des données, associées à l’exploitation de nos données les plus intimes : la connaissance quasi-exhaustive de notre génome (et donc d’une partie de celui de nos descendants qui n’auraient rien souscrit).

Car depuis la publication de Gymrek et al., dans Science de janvier 2013 : Identifying personal genomes by surname inference, il semble difficile de soutenir l’anonymisation des données présentes dans les banques publiques. Il semble difficile d’imaginer que déposer son génome dans les banques d’une firme privée ne constitue pas un problème dont il faut d’ores et déjà prendre la mesure.

Car si tout le monde s’accorde sur les bienfaits potentiels de la médecine qui exploite la connaissance approfondie des bases nucléiques d’un patient ou d’un bien portant-futur mourant, actuellement le pouvoir est aux mains des firmes privées (Knome, 23andMe), qui se constituent des bases de données colossales. Ces bases de données hébergeant des quantités exponentielles de génomes humains (dans l’immédiat il s’agit plutôt de génotypes) permettront à leurs détenteurs de dominer un marché (voire plus !) qui s’annonce colossal…

DNA-Vision est devenue en 2011, le prestataire européen en génomique avec la plus grande puissance de séquençage (quatre systèmes Solid, deux HiSeq2000, un GAIIx, tous deux d’Illumina, et deux 454-de chez Roche). La petite société issue de l’Université Libre de Bruxelles (ULB) et fondée en 2004 a bien grandi et est actuellement dirigée par Laurent Alexandre. Ce dernier est le créateur du site e-toubib, Doctissimo, aujourd’hui détenteur de 80 % de DNA-Vision, suite à la vente de son site internet à Lagardère qui a permis à l’ex-chirurgien de devenir riche… engrangeant plus de 139 millions d’euros suite à la transaction. Il faut dire que le docteur en médecine, chirurgien urologue, énarque et diplômé en sciences politiques a été à l’origine de plusieurs sociétés dans le domaine médical : Benefit, Medcost, Clinics et enfin le site préféré des hypocondriaques, Doctissimo. C’est avec pour idée principale d’appliquer le séquençage, en profitant de sa vertigineuse baisse de coûts, au champ de la médecine personnalisée que le médecin essayiste, auteur de « la mort de la mort » est devenu président de la société DNAvision. Même s’il est vrai que, l’encore assez nouveau président de DNAVision, préparant l’entrée en bourse de son entreprise, parle de médecine personnalisée, la société belge est connue pour sa maîtrise des technologies haut-débit et à titre d’exemple, pour son expertise du séquençage appliqué aux études métagénomiques (vous pouvez lire : Impact of diet in shaping gut microbiota revealed by a comparative study in children from Europe and rural Africa, PNAS, avril 2010).

Revenons au moins un instant sur le séquençage haut-débit appliqué à la médecine personnalisée, vu comme le fait de rendre accessible au soignant l’information génomique de son patient.

A une époque où le Dossier Médical Unique (DMP) a grand mal à devenir une évidence, à une période où l’accès universel aux soins est de plus en plus remis en question pour des raisons de disette financière, l’accès à une archive de plusieurs Gigaoctets de données par patient semble peu crédible à court terme. Ajoutés à cela les problèmes d’éthique, de confidentialité de données et de formation du personnel soignant à l’interprétation de ces données et vous comprendrez que le rêve d’un Laurent Alexandre aura du mal à toucher la médecine de masse mais pourra séduire les cliniques privées qui échappent à la problématique d’un accès universalisé aux soins.

On voit qu’à l’instar du tourisme spatial, la cible ne semble pas vraiment être le chômeur en fin de droit. La médecine pour pas grand monde… puisque si un séquençage coûte de moins en moins cher, l’interprétation des données générées et l’intégration de ces données dans un réel parcours médical est encore inaccessible aux 99 % des personnes les plus pauvres des 10 % des pays les plus riches.

Malgré tout, la médecine personnalisée dépasse cette vision de l’ADN. En effet, la médecine personnalisée comporte plusieurs approches :

– la détermination du risque (un génotypage haut-débit chez 23andme ou un séquençage chez un autre quidam pour vous dire que vous avez 2,03 % de chance de plus que la moyenne d’être atteinte de la maladie d’Alzheimer)

– la médecine stratifiée où seuls les patients répondant positivement à l’administration d’une solution curative, minimisant les effets secondaires de celle-ci, seront traités.

– la thérapie génique (un peu passée de mode) pour laquelle il existe trois types de thérapies :  la transfection permanente d’ADN, la transfection transitoire d’ADN, les thérapies portant sur l’ARN.

Si le séquençage multiparallélisé de l’ADN a tendance à se démocratiser au sein des laboratoires de recherche et de certains laboratoires en usant comme diagnostic, il semble qu’un pas de géant reste à franchir pour que celui-ci transforme complètement notre vision de la médecine. La médecine personnalisée n’est cependant pas à remettre en question… il s’agit juste de lui donner un horizon réaliste et réalisable, sans quoi cette notion sera à ranger, comme beaucoup d’autres avant, aux rayons des mots clés usés par la mode.

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